
Entre un renforcement des réglementations et un marché difficile, les banques sont forcées de réagir et de se perfectionner, pour rassurer et attirer les investisseurs. Pour ce faire, elles choisissent d’unir leurs compétences et leurs réseaux à travers des partenariats réglementaires, des fusions de domaine d’activité et/ou de prestations proposées.
Une union mondiale pour plus de sécurité
Dix-huit des plus grandes banques américaines, européennes et asiatiques se sont unies pour modifier les règles de fonctionnement du marché de 5,5 billiards d’euros de produits dérivés. Elles ont accepté d’abandonner le principe du « débouclage automatique » (close out) des contrats si une institution financière se trouve en difficulté, a annoncé dans un communiqué l’Association Internationale des Swaps et Dérivés (ISDA). L’objectif étant de donner plus de temps aux régulateurs pour qu’ils trouvent une alternative à une faillite susceptible de créer un séisme sur le marché, comme dans l’affaire Lehman Brothers en 2008. Les banques se doivent d’être autonomes, même en cas de crise, et de ne plus compter sur un éventuel support du gouvernement. Elles veulent ainsi limiter le risque systémique, too big to fail, et consolider la sécurité du système financier mondial. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er janvier 2015.
Une alliance européenne contre la Taxe sur les Transactions Financières (TTF)
Plusieurs associations bancaires européennes (privées et publiques) représentant la majorité du secteur bancaire se sont regroupées pour remettre en cause la mise en place de la TTF. Aujourd’hui, l’ensemble des échanges d’actions est taxé, alors que seule une partie des produits dérivés l’est. Les gouvernements français et autrichien souhaitent mettre en place cette taxe à un taux très bas sur l’ensemble des transactions (0,1% sur les actions et obligations, et 0,01% sur les produits dérivés). Cette taxe serait susceptible de rapporter 36 milliards d’euros par an à la France. Chaque pays essayant de défendre ses propres intérêts, ils n’ont pas réussi à se mettre d’accord dans le délai qui leur était imparti. Le regroupement des banques dénoncent :
- une augmentation du coût de financement des entreprises,
- l’absence d’une étude d’impact de la mise en place d’une telle taxe,
- une baisse des volumes de transactions et donc de liquidité des marchés,
- une inégalité entre les zones où la taxe sera appliquée et où elle ne le sera pas, et par conséquent un risque d’ « isolement […] des institutions financières dans leur juridiction».
Suite à la forte réaction des banques européennes et à la veille du Conseil européen devant se tenir dans quelques jours, l’État français demande l’exclusion des transactions sur titres étrangers, ce qui aurait pour effet de neutraliser le pouvoir antispéculatif d’une telle taxe.
Plus de simplicité pour favoriser l’exportation
Aujourd’hui, les PME représentent 80% des entreprises exportatrices de biens. Bpifrance et BNP Paribas ont décidé de s’allier pour simplifier les démarches des PME (Petites et Moyennes Entreprises) et ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire), au service du développement international. La mondialisation des entreprises est un facteur majeur à leur croissance ; les sociétés ouvertes à l’international y réalisent en effet plus d’un quart de leur chiffre d’affaires en moyenne.
« Nous avons beaucoup d’entreprises communes, nous leur proposons des programmes sur mesure, l’objectif premier étant de simplifier leurs démarches à l’étranger, qu’il s’agisse des ventes ou d’une implantation, pour, in fine, accélérer leur croissance », précise Denis Laplane, directeur de la clientèle entreprises et membre du comité exécutif de la banque de détail en France de BNP Paribas. Les deux banques s’unissent pour ne présenter qu’un unique interlocuteur auprès de leur clientèle entreprises souhaitant développer leur croissance à l’international, quel que soit le service proposé :
- la promotion des produits auprès de leurs clientèles entreprises respectives souhaitant initier ou renforcer une activité à l’international,
- l’assistance et l’accompagnement des entreprises en recherche de solutions techniques et financières,
Partenariat BNP Paribas – Bpifrance en quelques chiffres
Bpifrance a accordé 430 millions d’euros de prêts-export sur des opérations à 7 ans. Bpifrance a décidé de faire passer de 100 000 à 200 000€ sa délégation de garantie à la banque, tout en augmentant sa garantie à 70% du crédit consenti à l’entreprise nouvelle. Dans le cadre du programme « BNP Paribas Entrepreneurs 2016 », la banque s’engage à aider au moins 1000 TPE-PME à s’internationaliser. Cette collaboration pourra s’appuyer sur le réseau mondial de BNP Paribas implanté dans 70 pays, avec 220 centres d’affaires dans le monde, et le service « One Bank » pour la gestion des flux.
Des partenariats interbancaires pour renforcer les secteurs d’activité
BNP Paribas et l’Espagnol Cajamar s’allient dans le crédit à la consommation
BNP Paribas renforce son positionnement en Espagne sur le crédit à la consommation, en s’alliant avec le groupe coopératif ibérique composé d’une vingtaine d’entités bancaires, « Grupo Cooperativo Cajamar ». Ce regroupement se traduit par la fusion :
- des 4 millions de clients espagnols de Grupo Cooperativo Cajamar au travers de son réseau de 1300 agences,
- des 2,5 millions de clients de Cetelem (filiale de la BNP),
- du réseau international de BNP Paribas Personal Finance, dans une trentaine de pays, et pesant un peu plus de 10% du produit net bancaire de BNP Paribas.
Un accord de joint-venture signé entre le Crédit Agricole CIB (CACIB) et Sumitomo Mitsui Trust Bank (SMTB) dans le secteur du financement maritime
Crédit Agricole, leader dans le financement maritime, annonce la création d’une co-entreprise « Sea Bridge Finance » avec la banque japonaise SMTB. L’industrie maritime est un secteur en difficulté depuis 2011. Ses capacités de financement avaient donc été réduites de moitié. Depuis « le marché du shipping a retrouvé 75% de ses capacités de financement par rapport à la décennie 2000- 2010 », selon Thibaud Escoffier. Les deux acteurs prévoient d’y investir un milliard de dollars d’ici les 3 prochaines années. La création de cette co-entreprise renforcera le positionnement des deux banques sur le marché du shipping. En effet, CACIB élargira son réseau au Japon, et SMTB profitera des financements montés par son partenaire pour s’ouvrir à l’international. Aujourd’hui la banque est concentrée à 95% sur le marché japonais. Les deux banques s’unissent pour renforcer leur position de leader dans le secteur maritime :
- la banque japonaise détient un portefeuille de 11 milliards de dollars,
- la banque française est à la 3ième place mondiale avec 18 milliards de dollars de financements.
Quel avenir pour les regroupements bancaires ?
La réponse de Thomas Puschmann, chef de projet au Direct Management Institut de la HEC de St-Gall, va à l’encontre d’une ascension des fusions / regroupements dans le secteur bancaire, pour les années à venir : « Il existe un important potentiel de fusion dans le monde bancaire du fait qu’un certain nombre d’établissement a essentiellement vécu de l’évasion fiscale ces dernières années. Par contre, on ne doit pas s’attendre à des fusions parmi les grandes banques. […] Le principal obstacle que devront surmonter les banques, c’est la montée en flèche de la régulation. […] Elles devront affronter [… et] trouver le bon équilibre entre la standardisation et l’individualisation. »
Laetitia G.