Conflit Ukraine Russie : quels impacts pour la conformité ?

Conflit Ukraine Russie : quels impacts pour la conformité ?

A la suite des accords de paix de Minsk, six ans après le début du conflit armé dans l’Est de l’Ukraine et l’annexion illégale de la péninsule de Crimée par la Russie, une détérioration des relations dans la région du Donbass entre les indépendantistes pro-russes soutenus par Moscou et le gouvernement ukrainien s’est observée.

L’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine viole le droit international et les principes de la charte des Nations Unies, et porte atteinte à la sécurité et à la stabilité européennes et mondiales.

Les risques accrus posés par cette invasion génèrent une recrudescence du nombre d’alertes en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT) et de hits à traiter, y compris des faux positifs. Cette crise a en effet obligé les banques à adapter leurs dispositifs de lutte anti-corruption et anti-blanchiment en intégrant de nouveaux paramétrages des outils de filtrage et de profilage LCB-FT.

Quelles sont les mesures et sanctions internationales mises en place à la suite de cette crise actuelle ?

Le gaz et le pétrole constituent le poumon de l’économie russe.

En Mars 2022, la moitié des exportations énergétiques russes est dirigée vers l’UE, soit environ 125 milliards de dollars et 8,5 % du PIB russe. Les exportations de pétrole vers l’UE représentent plus de 100 milliards de dollars pour la Russie, soit environ 7 % du PIB russe.[1]

Les sanctions contre la Russie visent les secteurs commerciaux, technologiques et militaires.  Des sanctions sont également prises concernant certaines activités avec la Biélorussie, alliée à la Russie.[2] Les banques sont contraintes de renforcer leurs programmes de conformité pour limiter les risques de sanctions et de réputation en cas de non-respect des mesures. Des contrôles supplémentaires sont à mettre en place en termes de vérification et de connaissance client KYC et LCB-FT. La gestion des alertes peut avoir des impacts sur l’allocation des ressources dédié au traitement des flux.

Des mesures restrictives ont été instaurées et prévoient notamment l’interdiction d’exporter et de vendre certains produits en Russie et aussi d’importer du charbon en provenance de Russie (par exemple, biens de haute technologie à double usage ou ceux susceptibles de contribuer au renforcement militaire de la Russie).[3] Les taux d’intérêt élevés sont l’un des principaux obstacles à surmonter et les services fournis par les banques russes sont limités et onéreux.

La Banque de Russie a imposé un contrôle des capitaux limitant à la fois les retraits d’argent et l’échange du rouble contre des devises étrangères. L’UE et les États-Unis ont procédé aux blocages de comptes bancaires et d’avoirs financiers d’oligarques, de hauts dirigeants russes et de personnes morales russes.

À la suite de cette crise, les banques reconsidèrent leur aversion au risque i.e. au niveau et type de risque qu’elles peuvent et souhaitent assumer dans leurs expositions et leurs activités. Les banques devront se poser la question de refuser les entrées en relation d’affaires avec des clients ayant des liens avec la Russie ou de gérer ces relations complexes.

Certaines entreprises présentes en Russie ont décidé d’arrêter toute activité. A titre d’exemple, la SG a cessé ses activités de banque et d’assurance en Russie et va céder la totalité de sa participation dans Rosbank, poids lourd du secteur bancaire russe, ainsi que ses filiales d’assurance dans le pays.

Ce conflit va-t-il conduire à renforcer la place des crypto-monnaies ou du Bitcoin dans le système financier international ?

Les crypto-monnaies occupent le rôle de « valeur refuge » et servent de levier de contournement aux sanctions économiques. La vice-première ministre ukrainienne a fait un appel aux dons en crypto-monnaies. Les Ukrainiens s’étaient tournés vers ces devises décentralisées pour se protéger de la baisse de leur devise. De plus, un autre avantage des dons en crypto-monnaies est la rapidité des transferts.[4]

Malgré sa volatilité, le bitcoin est considéré comme une arme afin de se prémunir contre la baisse de la monnaie nationale et de contourner les sanctions internationales.

La banque centrale russe a acheté des tonnes d’or et des devises étrangères pour remplacer le dollar dans ses réserves de change. Moscou dispose de réserves de change, qui s’élèvent à 630 milliards de dollars.

L’Europe a étendu dernièrement aux crypto-monnaies son catalogue de sanctions prises après le début du conflit en Ukraine, en excluant notamment les établissements bancaires russes du système interbancaire international SWIFT. En effet, le réseau SWIFT a été suspendu mais la Russie a développé une alternative de système de messagerie financière ou la carte de paiement Mir utilisée par 87% des Russes (représentant ¼ des transactions).

Quelles sont les perspectives d’avenir du conflit russo-ukrainien ?

Ce conflit engendre des changements structurels en Ukraine, en Russie et dans le monde.

Une transition énergétique aura lieu mais soulève de nombreuses interrogations.

  • L’UE sera-t-elle unie face à leur dépendance énergétique concernant le gaz et le pétrole russe ?
  • Quels seront les impacts et le coût de ne plus se fournir en gaz et pétrole russe ?
  • De nouvelles sources devront-elles être explorées ?

En effet, ce conflit accélère la transition énergétique, les projets de financement dans le secteur des énergies renouvelables (éolien et solaire) et nucléaire verront leur croissance accélérer.

Une inflation et remontée des taux sont possibles. Les banques vont devoir s’adapter à ce nouvel environnement de taux. Elles devront aussi s’assurer qu’elles peuvent résister à un scénario de stress de type stagflation.

Pendant cette période de tension, une attention particulière et une demande d’agilité sont demandées à tous les acteurs règlementaires bancaires, des règles de déontologie devront être mises en place et les banques seront certainement plus frileuses sur le recrutement des profils ayant un lien avec la Russie.

Sophie HOK, consultante CMG Advisory

[1] La (co)dépendance énergétique de l’Europe et de la Russie en chiffres | Public Senat
[2] Crise ukrainienne : l’Occident annonce une série de sanctions contre la Russie (lemonde.fr)
[3] Notes aux opérateurs et mesures restrictives en réponse à l’agression militaire de la Russie | DGDDI (douane.gouv.fr)
[4] Ukraine: comment les cryptomonnaies ont pris un rôle inédit dans le conflit (france24.com)

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