La crise économique, une crise de dette ou de souveraineté ?

La crise économique, une crise de dette ou de souveraineté ?

Analyser un contexte économique est délicat. Comprendre avec lucidité les évènements passés est difficile, comprendre la situation actuelle l’est d’autant plus. Aussi, tenter de percevoir les causes réelles des crises pour être en mesure de les comprendre est un enjeu fondamental. Si nous remontons un peu dans le temps, la crise des subprimes qui a été perçues par de nombreux économistes en raison de la dichotomie entre l’activité économique et l’extraordinaire montée des bourses et du prix immobilier dans certains pays notamment les Etats unis avec l’impact sur le monde entier que nous connaissons aujourd’hui. D’autres crise comme celles liées au trafic de l’Euribor et du Libor a elle été beaucoup plus discrète. Le sujet de laa dette bien que perçue en surface par beaucoup d’économiste est bien souvent analysée sous un seul prisme, celui du coût de son remboursement.

Depuis une dizaine d’années, la situation politico-économique et sociale est très mauvaise. Récemment, une crise économique à venir est sur toutes les lèvres, une crise liée au problème sanitaire, indépendamment des décisions prises par les gouvernements des vingt dernières années.

Le chômage a explosé depuis quelques années et la précarité va exploser même si elle est pour le moment masquée par les politiques économiques de court terme. La création de la dette future sur les prochaines générations est une question d’envergure, mais une fausse question, une simplification visant à culpabiliser les économistes de proposer une politique budgétaire en focalisant l’opinion sur les conséquences négatives de la dette. Outre le chômage et l’absence de politique budgétaire, le sujet de l’investissement est aussi critique. Les agents économiques cherchent des titres sûrs, le titre sûr aujourd’hui, le titre étatique, à un rendement négatif. Cette situation existait déjà avant l’apparition du COVID. Ils se tournent alors vers d’autres titres plus risqués, qui eux aussi, à leur tour, voient leur rendement diminuer.

Cependant, si on analyse le contexte macro économiquement, l’Europe est dans une situation de trappe à liquidité. Aussi, les outils macroéconomiques actuellement à l’étude sont majoritairement monétaires, or, l’augmentation de masse monétaire en situation de trappe à liquidité est inefficace. Ainsi une solution est actuellement à l’étude, celle de la politique budgétaire européenne, pour cela, il faut analyser ce que signifie réellement la dette. Il faut voir que la dette n’est pas forcément un problème en soi, un emprunt peut permettre de rembourser l’emprunt et de dégager un surplus. La réalité est qu’on ne rembourse pas vraiment la dette. L’état a une espérance de vie éternelle, en cela, l’accumulation de dette est, macro économiquement, un non problème. L’état, lorsqu’il est maître de sa monnaie, peut créer de la monnaie pour rembourser sa dette.

Un état en revanche peut faire faillite lorsqu’elle emprunte avec une devise étrangère, c’est la situation de l’euro. Aujourd’hui nous sommes dans un paradoxe macroéconomique où la dette est souveraine, mais la monnaie n’a pas de souveraine. La troïka européenne a d’ailleurs permis le sauvetage de la Grèce de sa propre faillite liée à sa dette. La réalité d’une faillite d’état a été, à partir de cet évènement, conceptualisé comme une réalité, impensable auparavant. L’intérêt dans le contexte Grec était de renflouer les entreprises grecques pour éviter avant tout que les banques allemandes ne soient trop impactées par le contexte économique. Ce renflouement a permis aux banques allemandes d’acheter les aéroports grecs (et des îles grecques), lorsque l’on sait que le tourisme est un des principaux moteurs de l’activité grecque, la Grèce a donc vendu sa survie contre un appauvrissement progressif et inéluctable de sa population lié à la vente de ses actifs contre une réduction de sa dette. L’asservissement de la Grèce à l’Allemagne a servi de leçon aux autres états européens pour leur montrer ce qu’il peut arriver à un état qui ne respecterait pas les règles établies par l’Europe.

Concernant la souveraineté, la Troïka pose un autre problème, celui de la démocratie. En effet, aucun des membres de la Troïka n’est élu, il est ou du moins peut être nommé par quelqu’un d’élu. L’Europe est sur ce sujet une bonne idée mal réalisée telle qu’elle est actuellement structurée, elle est encore à un stade d’intégration économique incomplet tel que défini par Béla Balassa. Il manque une autorité budgétaire commune pour que la souveraineté et la dette soit européenne et non souveraine, ce qui créerai une Europe fédérale réglant la dichotomie actuelle dans laquelle la monnaie est fédérale, mais pas les pays l’utilisant. La deuxième solution est de retrouver une souveraineté nationale avec une monnaie nationale, cependant, des pays majeurs comme l’Allemagne, qui bénéficient grâce à l’Euro de gain de compétitivité grâce à une monnaie européenne moins forte qu’elle ne le serait dans un contexte de sortie de la zone Euro, rendent impossible ce retour en arrière.

Le futur plan européen budgétaire place une première pierre sur la mutualisation de la dette, ou plutôt le paiement à d’autres pays de la cotisation à l’Europe. La France donnera 80 milliards et en recevra 40, d’autres pays comme l’Italie recevront plus qu’elles ne payeront. L’astuce européenne liée à la création de monnaie est que les pays reçoivent tout de suite et paie sur plusieurs dizaines d’années.

L’idée que les impôts sont liés à la dette du plan Européen n’existe pas. Les fameuses « générations futures qui paient la dette », n’existe pas non plus. Les générations futures vont hériter de la dette, mais aussi de la créance, soit un actif net nul. Il se peut même que les investissements découlant du plan Européen soit positif, même pour d’autres périmètres comme les cotisations retraites. Le tout reste que ce plan Européen soit utilisé avec parcimonie et intelligence, acte qui dépend de la personne qui dirigera le pays lors de l’exécution du dit plan.

Aussi, il peut arriver que l’endettement européen soit comparé à ceux de pays africains, notamment ceux en voie de développement. Le problème des pays en voie de développement est différent. Les pays africains sont endettés en Dollar, aussi, étant donné qu’ils ne sont pas endettés dans leur monnaie nationale, le taux de change, lié à l’activité économique des deux pays, creuse de plus en plus l’écart des monnaies. Il faut donc chaque année, pour rembourser un même montant en dollar, de plus en plus de monnaie souveraine, jusqu’au moment où le pays craque sous l’endettement et le pays qui a prêté l’argent « s’arrange » en achetant les actifs du pays endetté (mines de pierres précieuses, ressources naturelles, entreprises, etc.) à un prix préférentiel. En plus de l’endettement, l’hyperinflation provoquée par la corruption accélère le processus.

La situation actuelle est problématique. En intégrant la baisse significative d’activité liée au COVID évidemment bien réelle mais qui est finalement anecdotique comparé au problème de souveraineté de l’Europe, bien que les médias généralistes répètent que c’est le contexte sanitaire qui place les pays Européen dans une situation délicate, l’année 2020 sera sans action supranationale une année de plus vers le déclin. Une vraie réflexion macroéconomique doit donc être apportée sur la composante structurelle de notre économie, de la disparition ou de la vente des secteurs stratégiques, sur la pérennité de notre système de retraite et plus généralement les justes actions à apporter à notre économie en dehors de toute idée reçue pour utiliser avec le plus d’efficience ce nouveau potentiel apporté par l’Europe.

The Theory of Economic Integration (Bela Balassa) / L’état de l’Union européenne (Jean-Paul Fitoussi) / The Euro. How a Common Currency Threatens the Future of Europe (Joseph E.Stiglitz)

L.KOLODZIEJCZAK

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