
Le paysage bancaire a beaucoup évolué depuis ces 10 dernières années. Quels sont les défis auxquels les banques traditionnelles doivent se confronter ?
Nous identifions 3 principaux défis pour les banques.
Un défi économique
Depuis 2008, les faibles taux d’intérêt faisant diminuer les marges des banques de détail ont eu un impact important sur leur modèle de revenus. Depuis, celles-ci ont besoin de transformation et de nouvelles sources de revenus pour maintenir leur rentabilité.
En effet, pour conserver les mêmes niveaux de performance que par le passé, les banques ont :
- Investi dans des actifs toujours plus risqués et d’échéance toujours plus éloignée,
- Revu le rôle des titres souverains dans la construction de leurs portefeuilles (les emprunts d’état pouvant difficilement être considérés comme des actifs sans risques),
- Investi essentiellement en obligations car il devient moins rentable de vendre de l’assurance-vie en euros offrant la garantie du capital.
Quelles conséquences de la baisse des taux ?
Les grandes banques diversifiées sur plusieurs métiers et plusieurs géographies vont limiter les pertes de revenus et les risques, mais les banques de dépôt toutes simples, qui font du crédit immobilier et financent les PME, risquent de calancher les unes après les autres » analyse un grand banquier français.
Cet aplatissement de la courbe des taux érode petit à petit la marge des banques qui se voient obligées de mettre en place des plans d’économies. « Il faut s’attendre à ce que les banques réduisent leur nombre d’agences, indiquait Robert Ophèle, dans une contribution pour l’Institut Messine sur les taux négatifs. Beaucoup d’emplois dans le secteur bancaire pourraient à terme être menacés, dans un secteur qui représente aujourd’hui tout de même près de 400.000 emplois directs en France. »
Un défi réglementaire
Les nouvelles règles de l’UE et les politiques françaises visent à faciliter le changement d’une banque à une autre, ce qui favorise une concurrence élevée et accroît le coût de fidélisation des clients.
L’étude annuelle du cabinet Deloitte montre que la confiance des français en leur banque diminue. Elle n’est que de 60 % en 2016, pour les banques traditionnelles, contre 65 % pour les mutualistes et 79 % pour les banques en ligne.
Les banques traditionnelles françaises souffrent également d’un taux de recommandation négatif. Toutefois la fidélité des français à leurs banques a permis, durant plusieurs années, aux banques traditionnelles de garder leurs positions vis à vis des banques en ligne et nouveaux entrants. Cependant, le taux d’attrition a doublé au cours de ces trois dernières années pour culminer à 4,8% l’an dernier.
Les dernières évolutions réglementaires (Loi Macron & PSD2) vont probablement renforcer cette évolution. En 2014, 4 à 5 personnes sur 10 interrogées dans le cadre d’enquête se sont déclarées prêtes à changer de banquier en ligne contre 3 sur 10 en 2009.
La loi Macron mise en place le 6 février 2017 vise à faciliter le transfert de compte d’une banque à une autre et a pour ambition de redistribuer les cartes dans un paysage bancaire jusqu’à présent assez atone. Le système n’étant, 8 mois après, pas encore très au point techniquement, le raz-de-marée de la mobilité bancaire se fait toujours attendre. En réalité, changer de banque s’est avéré plus difficile que prévu. « La mise en œuvre de la mobilité bancaire automatique, défi technique très important dans une période restreinte, a connu quelques difficultés pendant cette phase de rodage », explique Benoît Grisoni directeur général adjoint de Boursorama, en évoquant « Des blocages du système, des opérations qui n’apparaissent pas… De plus certains cas n’étaient pas prévus par le texte de loi ». Il sera intéressant d’analyser les résultats dans quelques mois.
Concernant la nouvelle réglementation « Payment Service Directive 2, PSD2 » ou « DSP2, Directive sur les Services de Paiement 2 », parue au Journal Officiel de l’Union Européenne en janvier 2016 (avec une date limite de mise en application fixée à début janvier 2018), invite les banques à rationaliser et sécuriser leurs méthodes de gestion des paiements. Objectifs : améliorer la protection et la qualité d’expérience des utilisateurs pour ce qui concerne leurs moyens de paiement et encourager une baisse des prix des transactions.
Cette réglementation impactera plus d’un milliard de clients et jusqu’à 40% du produit net bancaire. La directive redéfinit la relation banque-client et représente le développement le plus important de la banque depuis la mise en place des banques en ligne.
Pour en savoir plus, lisez notre article « Directive sur les Services de Paiement 2 (DSP2) : Nouveautés & enjeux liés aux nouveaux services de paiement »
Dans ce contexte, les banques en ligne ou banques mobiles ont une carte à jouer, les néo-banques ont elles aussi l’intention de tirer parti de ces opportunités. De leur côté, les banques traditionnelles, conscientes de la menace, doivent renouer avec leur clientèle, la satisfaire, proposer des offres et services adaptés et attractifs, revoir leurs grilles tarifaires et leurs processus.
Un défi concurrentiel
Challengées par de nouveaux entrants (fintech, acteurs du numériques et néo-banques mobiles), les banques traditionnelles sont défiées en termes d’expérience bancaire, de modèle de tarification et d’interface technologique.
- Exemples de start-up : la banque Ferratum, qui fournit gratuitement des multi-monnaies, la N26, une banque mobile allemande, le compte Nickel, une néo-banque française, Revolut, une banque collaborative,
- En plus des start-ups, de nouvelles banques sont également créées ou annoncées par les opérateurs télécoms (Orange et SFR), les commerçants (Carrefour avec C-Zam, Leclerc) et les compagnies d’assurance (AXA, Allianz et Macif),
- Enfin les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) sont aussi en « embuscade » et représentent une menace supplémentaire pour le secteur financier. Si les standards technologiques à base d’API sont définis à temps pour PSD2, ces acteurs n’hésiteront pas à se lancer en s’appuyant sur une matière qu’ils maîtrisent parfaitement : les open API.
Pour faire face à ces défis les banques doivent se préparer et doivent faire évoluer leur modèle commercial, en privilégiant les revenus de commissions (facturation d’un service) sur les revenus d’intérêts, fortement sous pression.
Il sera également utile de donner la priorité à la transformation et à l’innovation et à générer toujours plus de nouvelles sources de revenus, tout en améliorant leurs propositions à leurs clients. L’expérience client digital est et sera un axe majeur pour se différencier et rester compétitive afin de favoriser l’acquisition et la fidélisation des clients. Et pour chacun de ces défis, il sera nécessaire d’adopter une approche collaborative et de motiver les équipes. Cela nécessitera un changement culturel et organisationnel afin de converger vers une même vision et un même objectif.
Erika G.