
Le 17 janvier 2018, une « journée de la transformation digitale » se proposait d’apporter un éclairage sur la nécessité et les manières d’aborder la transformation digitale sans attendre. Une série de conseils avisés ressort clairement de l’ensemble de ces conférences très riches en retours d’expériences.
1) Identifier un leader de la transformation
Pour pouvoir transformer une organisation, il faut nécessairement s’être au préalable approprié et maîtriser le fonctionnement de l’entreprise. Il est donc fortement recommandé de choisir un responsable en interne qui dispose d’une vision complète du fonctionnement actuel de l’organisation.
Ce responsable devra, avec son équipe, formaliser et communiquer une vision claire de la transformation et donner l’impulsion aux équipes directement concernées par les changements.
Dans un contexte où la donnée devient un enjeu majeur, le DPO – Data Protection Officer (voir encadré) – jouera également un rôle clé dans la stratégie de la transformation de l’organisation à ses cotés.
Un DPO doit être nommé obligatoirement avant le 25 mai 2018 dans trois situations :
- Pour les traitements réalisés par une autorité ou un organisme public,
- Pour les organismes ayant pour activité de base des opérations de traitement nécessitant le suivi régulier et systématique des personnes à grande échelle,
- Pour les organismes ayant pour activité de base le traitement à grande échelle de données dites « sensibles » ou relatives aux condamnations pénales et infractions.
Dans les autres cas, le DPO n’est pas obligatoire.
2) Accompagner vos collaborateurs
Ils sont la richesse de votre modèle économique et doivent le rester dans un environnement désormais résolument numérique ! C’est toute la culture de l’entreprise qui doit être révolutionnée. Il faudra s’assurer de l’adhésion maximale de chacun des salariés, et donc prévoir d’allouer une énergie importante à l’accompagnement de vos collaborateurs.
Plusieurs solutions innovantes, déjà appliquées dans des moyennes et grandes entreprises françaises, peuvent être envisagées. Le « reverse mentoring » permettra un échange de connaissances et de pratiques entre les millennials (génération Y) et les seniors de l’entreprise. Sur un plan purement opérationnel, certaines IA proposent déjà d’analyser les comportements des collaborateurs pour leur prescrire un niveau de formation adapté voire personnalisé.
3) Penser les innovations au niveau mondial
La concurrence s’accélère, et il n’est plus à l’ordre du jour de penser une innovation pour un seul pays, au risque de voir cette innovation reprise et répliquée sur d’autres marchés sans avoir le temps de réagir. L’idée est de penser directement à des innovations pour une cible globale, et bien évidemment pour un meilleur rendement, quitte à prévoir des adaptations spécifiques pour certains marchés, ou bien des déploiements progressifs.
Il faut également penser global en termes de conception de vos innovations, car c’est en faisant collaborer des équipes de différents pays que vous pourrez bénéficier de la richesse des cultures et des visions pour disposer d’une innovation aboutie et répondant à un marché global.
4) Accueillir les fintechs
Ces entreprises technologiques ont un effet bénéfique pour l’ensemble du secteur. Leur force est d’avoir identifié des besoins non satisfaits et d’y répondre en proposant des offres de services pertinentes, sous des délais record et avec les dernières technologies disponibles. Il ne faut pas les voir comme des acteurs qui se positionnent en concurrence des banques, mais plutôt en complément voire en partenariat.
C’est en travaillant avec ces entreprises qui apportent une vraie valeur ajoutée sur les services clients que les banques vont différencier leur transformation et continuer à innover. Le marché des fintechs foisonne actuellement de plusieurs centaines d’acteurs mais sa rationalisation est inévitable. Les banques doivent se positionner dès que possible afin de faire les meilleurs choix.
Selon Joëlle Durieux, Directrice générale du pôle de compétitivité mondial Finance Innovation, l’interaction entre ces acteurs devient un « partenariat naturel », et parle en conséquence d’une « co-évolution » des Fintech et des institutionnels tels que les banques.
5) Ne pas se spécialiser dans les technologies
Plus largement que ce qui a été évoqué concernant les Fintechs, les spécialistes technologiques (GAFA, éditeurs, etc.) auront toujours une longueur d’avance sur leur domaine. Il sera donc plus efficace de coopérer avec ces spécialistes plutôt que d’essayer de les concurrencer. La principale richesse des acteurs traditionnels de la bancassurance est la relation humaine qu’ils entretiennent avec leurs clients, et qui devra évoluer vers davantage de conseil et d’accompagnement personnalisé.
6) Voir la réglementation (RGPD notamment) comme une opportunité
La Commission européenne estimerait à près de 400 milliards d’euros le manque à gagner représenté par la non exploitation des données par les entreprises en Europe, et à plus de 200 milliards d’euros les opportunités générées par cette activité sur le marché. Tout investissement sur cette thématique opérationnelle, s’il est bien exploité, saura donc être récompensé !
Et comment faut-il aborder la Blockchain ?
Dans un objectif d’expérimentation, avec pour principe de mettre en pratique cette nouvelle technologie révolutionnaire sur un premier projet simple et concret. Un exemple significatif à la Banque de France :
Le projet « MADRE », qui vise à attribuer les Identifiants Créanciers SEPA (ICS) grâce à une chaine de blocks. C’est le propre rôle de la banque qui est codé dans la blockchain, on peut alors parler de « central bank-as-a-code ».
- Le RGPD – Règlement Général sur la Protection des Données – s’attache à responsabiliser les entreprises sur la maîtrise et la sécurité de leurs données, considérées comme le pétrole du web. Ces données ne sont pas toujours maitrisées et se retrouvent stockées et exploitées aux États-Unis, où les cerveaux des IA sont le plus souvent français. Le RGPD va impliquer, pour ce qui est du marché français, le retour des données en France et donc potentiellement le retour de ses cerveaux, et par conséquent de l’innovation !
- La DSP2 – Directive sur les Services de Paiement – s’attache à faciliter les échanges de données client entre les différents acteurs des paiements, de manière sécurisée et structurée grâce notamment aux API – Application Programming Interface. Car si les données sont le pétrole du web, les API en sont les oléoducs !
L’enjeu d’une gestion maîtrisée et relocalisée des données est donc crucial pour en exploiter toute leur richesse. Audelà de la conformité dans l’utilisation de ces données, c’est bien une réelle éthique qui est attendue par les utilisateurs (et donc les clients finaux) et que les entreprises devront viser au plus vite afin de se différencier.
7) Personnaliser l’expérience client
Le constat est simple et universel : un client qui dispose d’une relation personnalisée avec un fournisseur partira plus difficilement que s’il dispose uniquement d’un rapport qualité/prix intéressant. Un autre constat simple est que rien ne sert d’innover si l’offre ne répond pas un besoin (avéré ou anticipé) des clients.
Un enjeu différenciant sera de conserver une constance de l’expérience client sur les différents canaux online et offline : c’est ce à quoi devront répondre les nouveaux usages du numérique dans l’entreprise, dans la banque en particulier.
Le client est le seul propriétaire de ses données personnelles. Ainsi il va souhaiter entrer dans une démarche où il va pouvoir définir quels sont les éléments qu’il souhaite voir utilisés, pour quel usage et surtout quels bénéfices directs pour lui-même.
Enfin la clé de la personnalisation est dans la relation humaine, valorisante pour le client tout comme le collaborateur.
8) Ne pas attendre davantage pour se lancer
Le marché n’attend pas : développement exponentiel des fintechs en 2017, arrivée des premières banques 100% mobile, DSP2 applicable depuis le 13 janvier 2018, RGPD applicable au 25 mai 2018, etc.
Il est temps de définir ou de revoir votre stratégie de transformation, et de communiquer largement votre vision auprès de vos clients et de vos collaborateurs !
Alexandre N.