Changement climatique : quel rôle pour le contrôle interne ?

Changement climatique : quel rôle pour le contrôle interne ?

Le changement climatique, un sujet « à la mode »

La protection de l’environnement fait désormais partie des sujets incontournables de toute activité économique. C’est devenu une exigence de la société.

Les acteurs de la finance sont concernés à double titre. Il s’agit en premier lieu d’un sujet d’éthique et d’image. Les investissements et financements ont une rentabilité, un risque, mais aussi un impact sur l’environnement. Le financement de l’industrie pétrolière, ou de projets d’exploitation minière dans des zones écologiques sensibles par exemple attirent l’attention.  Les clients y sont sensibles, et à l’heure des réseaux sociaux, la réputation d’une entreprise peut très vite en subir les conséquences.

Le deuxième aspect est le risque que représente le changement climatique pour les investissements et financements eux-mêmes. Les logements que les banques financent et que les assurances couvrent sont soumis aux risques climatiques. Les entreprises dans lesquelles les fonds investissent peuvent voir leur modèle économique bouleversé par le changement climatique, tel que dans l’automobile, l’aérien, la construction, l’exploitation d’énergies fossiles, le tourisme, … L’environnement, n’est donc pas seulement un sujet d’image. C’est aussi un risque à prendre en compte et à gérer au même titre que le risque de crédit, de marché, de liquidité…

Les exigences de la société deviennent les exigences du régulateur

Les institutions financières s’intéressent au changement climatique à double titre. Et par conséquent, les régulateurs aussi.

Les risques pesant sur le système financier sont historiquement l’activité principale des régulateurs et superviseurs, et le changement climatique n’y fait pas exception.

D’autre part, le développement durable est devenu une exigence des clients. Mais ces clients sont aussi des électeurs. Les pouvoirs publics se saisissent du sujet. Le développement durable est aujourd’hui une démarche volontaire des entreprises financières. Mais il pourrait bien demain être une exigence réglementaire.

Pour ces deux raisons, les régulateurs ont déjà commencé leurs travaux sur le reporting et la gestion des risques climatiques.

Pour les Société de Gestion de Portefeuille, l’AMF a ainsi publié une recommandation[1] en juillet 2020 sur les informations extra-financières à produire pour un reporting social et environnemental. Elle préconise entre autres la définition d’objectifs mesurables, la présentation de la méthodologie, l’obtention d’un label indépendant. Elle précise également les conditions pour faire de la performance sociale en environnementale un élément central de la communication du fonds.

Du côté des banques, le NGFS (Network of Central Banks and Supervisors for Greening the Financial System) a lui aussi publié en avril 2019 une liste de recommandations[2] relatives à la prise en compte de l’environnement par les entreprises financières. Sa première recommandation est sans détour : intégrer les risques climatiques à la supervision du système financier. Cette recommandation montre parfaitement la direction que prend le sujet climatique. Il s’agira de moins en moins d’une initiative des entreprises, et de plus en plus d’une exigence du régulateur. Les recommandations 5 et 6 poussent quant à elles à la mise en place de règles de reporting standardisées sur les sujets climatiques. Bientôt, les institutions financières devront publier les informations sur leur impact environnemental au même titre que leur balance comptable.

Le rôle du contrôle interne

Les trois lignes de défense[3] du contrôle interne vont devoir s’adapter à ces changements. Bien qu’il s’agisse pour l’instant d’une démarche volontaire, la stratégie de développement durable doit se décliner dans l’entreprise. Et comme toute approche stratégique, le contrôle interne doit assurer que les opérations et les reportings sont cohérents avec celle-ci à tous les niveaux de l’entreprise. Si par exemple, la stratégie d’une Société de Gestion est d’investir dans des actifs « verts », le contrôle s’assurera que les critères environnementaux des actifs sont respectés, que les informations sont fiables, que les éventuels sous-traitants respectent ces mêmes critères, que les reportings sur le sujet sont corrects, … En prenant davantage de recul, l’audit interne pourra également assurer la cohérence entre les différentes composantes de l’entreprise avec la stratégie (en suivant par exemple le modèle de congruence proposé par Tushman & Nadler[4]). Il pourra ainsi vérifier que les contrôles de 1er et 2nd niveau couvrent la thématique des risques environnementaux, que les pratiques RH d’objectifs, de récompense et de sanction vont dans le sens de la stratégie, que la communication interne et la culture d’entreprise soutiennent l’approche d’une finance durable…

Comme évoqué précédemment, le développement durable tend vers un sujet de conformité. Là aussi, comme tout sujet de conformité, le contrôle interne sera central pour assurer la fiabilité des reportings réglementaires et assurer le respect des exigences. Le contrôle interne d’aujourd’hui se doit donc d’anticiper ces évolutions réglementaires et s’y préparer en termes de formations, recrutements, conseil, …

Quentin DESSALLES, consultant CMG Advisory

[1] POSITION – RECOMMANDATION AMF DOC-2020-03 – https://www.amf-france.org/sites/default/files/doctrine/Position/Informations%20a%20fournir%20par%20les%20placements%20collectifs%20integrant%20des%20approches%20extra-financieres.pdf
[2] A call for action Climate change as a source of financial risk – https://www.banque-france.fr/sites/default/files/media/2019/04/17/ngfs_first_comprehensive_report_-_17042019_0.pdf
[3] Modèle promu notamment par l’IIA (Institute of Internal Auditors) – https://na.theiia.org/translations/PublicDocuments/PP%20The%20Three%20Lines%20of%20Defense%20in%20Effective%20Risk%20Management%20and%20Control%20French.pdf
[4] Nadler, D. A., & Tushman, M. L. (1980). A model for diagnosing organizational behavior. Organizational Dynamics, 9(2), 35-51

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